Le vrai prix des bonnes choses.

Le vrai prix des bonnes choses.

C’est sur la luxuriante plage de Dinard, quand le sable d’or et d’argent scintille aux moites étoiles du ciel marin, que je rencontrai ce dimanche mon ami le colonel Troadec, villégiateur émérite et businessman conquérant. Nonobstant mon maillot léopard et mes tongs Marsupilami, le colonel ne se départit pas de sa déférence à l’égard de la haute et puissante représentation de l’État qu’un Ministre du Dimanche ne cesse d’illustrer sur les plages comme au casino.

« Mon cher Ministre, permettez-moi, en ces temps caniculaires où le budget du pays fond dans les poches des contribuables comme une glace à la vanille, de vous faire part du lumineux projet qui doit sans délai mettre un point final et décisif à l’impécuniosité chronique de votre gouvernement. »

La gravité annoncée du sujet requerrait une solennité passablement altérée par ma mise aussi allègrement estivale que furieusement sexy et je proposais donc à mon colonel de passer de concert un pantalon et un polo dignes de l’élévation de ses propos à venir. J’offris à mon commensal de partager une bouteille de Champomy sur la terrasse du Grand Hôtel Barrière.

« Ah, redoutable ministre ! Allez-vous me compromettre en sifflant votre coûteux élixir payé sur le dos du contribuable essoré ? Je vois autour de vous tout un appareil de luxe et de volupté fort dispendieux et je suis terrifié à l’idée que cela ne soit phynancé par cet argent public dont vous savez qu’il est le plus déterminé à faire de vous un ministre démissionnaire !

— Mais c’est aujourd’hui dimanche et je suis en fonction ! Le détestable équipement de plage dont vous m’avez vu revêtu n’est qu’une tenue de travail et cette horrible gargote qui se parfume trop aisément du nom de Grand Hôtel me procure très administrativement un pucier moyenâgeux que dédaignerait un caporal-chef en campagne chez les Zoulous !

— Vous avez bien compris que les homards et les grands crus de votre ancien collègue aussi écologique que gourmand avaient causé sa perte et que, désormais, il ne vous sera plus permis d’acquérir la moindre canette de bière sur vos notes de frais sans encourir la saine et juste colère des citoyens. C’est pourquoi, cher ministre, je viens vous exposer la solution définitive aux dépenses somptuaires du gouvernement.

— Vous serez notre sauveur !

— Imaginez un instant que vous puissiez faire bombance sans retenue avec tous vos amis dans le faste qui sied aux palais de la République ! Imaginez-vous habillé par les plus grands couturiers et chaussé à prix d’or, véhiculé dans les plus luxueuses torpédos et béatement vautré dans les palaces les plus éclatants ! Et tout cela sans qu’il en coûte un traître liard au Trésor Public mais surtout avec l’assentiment, que dis-je, l’admiration de l’opinion en liesse !

— Quel est ce miracle, ô ineffable colonel ?

— Au pays de Mbappé, fais comme Mbappé ! Le sponsoring, luxurieux ministre, le sponsoring ! Un juteux contrat de sponsoring permettra de financer toutes les activités festives du gouvernement et des parlementaires en échange de l’adjonction d’une marque connue dans le libellé des institutions. Ainsi, le ministère Panzani de l’Éducation Nationale pourra offrir à son titulaire fêtes et réceptions dignes de son éblouissante calvitie, point de limite dans la taille des crustacés pour le président du Sénat Tropicana et vacances bahaméennes sans rougir pour le ministre Biscuits LU des Affaires Étrangères ! Certains préfets sont déjà demandeurs d’une mention République Banania Française sur le fronton de leur édifice pour boucler leur budget champagne et petits fours.

— Pensez-vous que mon ministère du Dimanche puisse être éligible à cette prodigieuse innovation ?

— Non seulement il est éligible mais je vous invite à rejoindre le programme de sponsoring des personnalités politiques éminentes : j’ai déjà une offre difficile à repousser pour le Premier ministre qui s’appellera désormais Édouard Crédit Agricole Philippe pour une durée contractuelle de deux ans. À l’attention de votre collègue porte-parole du gouvernement, j’ai prévu l’onctueuse dénomination de Sibeth Camembert Président Ndiaye. Pour vous, j’ai justement ici un contrat qu’il vous suffit de signer pour vous dégager des tourments pécuniaires de vos légendaires ribouldingues ministérielles.

— Montrez-moi que je signe illico ! C’est quelle marque ?

— Les couches culottes Pampers ! »

L’idée est salutaire, soit, mais jusqu’à quel extrémité ?

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